Mon burn-out : une crise salutaire

August 17, 2023

Bonjour et bienvenue sur ce site.

Nous allons nous rencontrer au fil de ces articles. Alors comme dans toute relation, je vais vous partager un peu de mon histoire, celle qui m’a menée jusqu’à vous aujourd’hui. Comme un bout de miroir, vous y découvrirez sans doute un bout de la vôtre.  

Je m’appelle Christine Parreno. Je suis née en 1963, par hasard sans doute, à Grenoble, ville utérine entourée de chaînes montagneuses dont je ne pensais jamais sortir un jour.

Je suis devenue médecin généraliste, sans hasard sûrement, toujours à Grenoble, choisissant l’exercice libéral en milieu rural. Pendant 10 ans j’ai accompagné la souffrance de ceux et celles qui m’ont fait confiance, avec sincérité, attention et passion. Au nom de ces 3 couleurs, j’ai consacré beaucoup de temps et d’énergie à cette « mission professionnelle ».

Emportée par cette routine frénétique valorisant savoir-faire, efficacité, reconnaissance et avoir, j’ai perdu contact avec cette femme qui se proposait, tout en s’ignorant, d’accompagner le mieux-être de ceux qui lui faisaient confiance.

Déclic N°1

Épuisement, burn-out.

Je me suis consumée sur le feu de mes certitudes et de mes habitudes. Selon le Larousse, consumer signifie « détruire peu à peu quelque chose en le réduisant à rien par l’action d’un feu ou d’une forte chaleur ». Sans avoir ressenti la moindre brûlure, je suis devenue cendre.

Déclic N°2

Cancer du sein. 

Confrontée à un effondrement psychique et physique, J’ai finalement accepté, avec culpabilité et désespoir, quelques semaines d’arrêt de travail. Je résistais encore alors.

Spectatrice cette fois, j’ai observé dans un bâillement muet et désespéré, le film de la vie que j’avais tricoté. J’ai regardé, impuissante, la dérisoire épitaphe du dérapage de ma vie.

J’ai pris conscience des conditions de plus en plus précaires auxquelles ce métier de soignant m’avait confronté dans un brouillard qui m’aveuglait peu à peu. Soumise, j’avais intégré sans discernement des injonctions, des nouvelles normes, des modèles et des protocoles évoulant san cesse. Découragée, j’avais perdu le sens de la relation d’aide dans l’impasse d’objectifs illusoires

Déclic N° 3 

Divorce.

Ma vie s’est brusquement figée. Le choix s’est imposé. Renoncer. L’effondrement agenouille. Pendant 2 longues années j’ai détricoté la vie que j’avais choisie mais dans laquelle je m’étais enlisée. J’ai défait patiemment chaque maille, et je me suis attardée sur chaque maille oubliée. J’ai suivi mon fil. Et un jour je suis partie le tricoter à l’endroit.

Avec une nouvelle respiration j’ai fécondé un projet assez fou dont j’en ai accouché 2 années plus tard.

Décision 

Le tour de France en passant par les DOM TOM, pour partir à ma rencontre.

Je me suis accordée le temps nécessaire pour mûrir un changement d’orientation professionnelle. Je souhaitai découvrir dans l’ailleurs une nouvelle manière d’être dans le soin.

J’ai défait les derniers nœuds matériels qui me retenaient. J’ai cédé ma clientèle, vendu ma maison, mon cabinet médical, puis les biens matériels que je possédais. J’ai pris soin de dire au revoir à chacun de mes patients avec lesquels tant de liens de confiance s’étaient tissés, en les accompagnant vers le relai qu’ils avaient choisi.

Je me suis patiemment allégée de l’avoir pour aller chercher l’être. J’ai affronté des peurs et traversé mes doutes. J’ai cherché à vivre le manque pour trouver la plénitude, à croire en l’abondance que toute expérience propose si elle est vécue avec confiance et conscience.

Silence

Longue retraite silencieuse dans un monastère normand. 

Cet isolement choisi m’a permis d’ouvrir les premières écluses qui me retenaient. Pendant ces précieuses semaines, inconfortables au début, j’ai questionné, sans repères, mes croyances limitantes et mes désillusions. Je me suis volontairement perdue pour m’autoriser à retrouver ma trace. Le silence est le cadeau que je me suis fait. Cet allié toujours présent m’accompagne, m’aide aujourd’hui à me recentrer et à ajuster ma posture.

Action

J’avais besoin d’élargir mon horizon vers une spécialisation que j’avais abandonnée au début de ma carrière professionnelle. J’ai donc choisi de poursuivre une qualification en psychiatrie.

Très rapidement, j’ai obtenu des postes successifs dans différents services de psychiatrie, me déplaçant dans de nombreux départements métropolitains et d’outre-mer. En sortant de ma zone d’habitudes, j’apprenais à choisir ma disponibilité, élargissais mes capacités adaptatives et découvrais la joyeuse richesse des rencontres du voyage.

Formations

En parallèle, je me formais à différentes approches psychothérapeutiques telles que les techniques de thérapies cognitivo-comportementales, thérapies des schémas, EFT, thérapie sexo-fonctionnelle, pleine conscience, communication non violente. J’explorais ces outils, seulement guidée par le plaisir et la curiosité. Plus je suivais mon fil d’Ariane, plus ma posture s’alignait avec justesse et authenticité dans la relation de soin à l’autre.

Mon indépendance professionnelle me rendait libre de toute pression institutionnelle. Elle me permettait également une observation plus lucide des différents fonctionnements et inter-relations des acteurs du réseau de soin.

Observations

Pendant 10 ans, au cours de ces différentes missions, j’ai rencontré des professionnels épuisés et découragés dans l’impasse des objectifs qui leur semblaient imposés de manière de plus en plus dictatoriale. Ils perdaient le sens de leur engagement et l’essence de leur fonction.  J’ai écouté leurs témoignages et les fréquentes mises en doutes de leurs compétences pourtant indiscutables.

J’ai également constaté l’évolution des attentes des patients et l’impasse des ressources humaines pour y répondre. 

Prises de conscience

La maladie peut se lire dans ses multiples expressions, somatique, psychique, sociale et écologique. Sa lecture demande un décodage pluri dimensionnel. Elle n’est pas linéaire. Il ne s’agit plus de « prendre en charge » l’individu malade, de porter le soin mais plutôt de l’accompagner à se questionner, à repérer les signes à l’origine de déséquilibre d’où émergent bien des risques, à être l’acteur responsable et pro-actif de son ré-équilibre.

Renforcer l’autodétermination du patient à la proposition thérapeutique. Donne sens à l’engagement des professionnels de la santé.

« Si quelqu’un désire la santé, il faut d’abord lui demander s’il est prêt à supprimer les causes de sa maladie. Alors seulement il est possible de l’aider ». Hypocrate

Proposition

Nourrie de mon expérience personnelle et de mes observations, j’ai réfléchi à la manière d’accompagner les professionnels de la relation d’aide et de soin.

Comment les aider à mieux se définir dans cette relation, à reconnaitre leurs limites et leurs besoins, les encourager à les exprimer et à les respecter, apprendre à être présent à soi avant d’être présent à l’autre ?

Si nous apprenions à surfer sur une nouvelle proposition de soin, dans une approche éthique et « écologique », en surfant sur notre environnement en constante évolution ?

Si nous définissions une posture d’aide et de soin différente mais respectueuse de la richesse de ce que nous sommes à chaque instant.

Si nous nous dirigions vers une approche écologique de la santé qui ait vraiment du sens ?

0 Comments

Submit a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Articles récents

Les cendres du burn out

Aujourd’hui je vous propose d’observer avec lucidité, les cendres de ce plat brûlé, c’est à dire...